
L’histoire de la maison Boissier est la première saga gourmande d’un entrepreneur passionné au service de l’excellence.
Quand au début du XIXème siècle, il quitte sa province pour conquérir Paris, le jeune Bélisaire Boissier n’est armé que de son rêve : devenir confiseur. C’est sur un quai de gare, face à un train rempli de châtaignes, que lui vint l’idée de les recouvrir de sucre afin d’arrêter le processus de décomposition : il est ainsi l’initiateur de la fabrication des marrons glacés. Quelques essais plus tard, il invente sa propre technique de glaçage qu’il étendra à d’autres produits. C’est enfin en 1827 qu’il fonde la maison Boissier.
Son premier comptoir érigé boulevard des Capucines remporte un succès tel que, très rapidement la maison ouvre des boutiques « Boissier » sur les plus belles artères parisiennes : boulevard de Courcelles, boulevard des Capucines, avenue Raymond Poincaré, 17 rue Auber, 2 Place de l’Opéra, Avenue Victor Hugo ou encore sur l’avenue des Champs-Elysées. Les belles élégantes s’y bousculent pour satisfaire leur gourmandise. Fort de cette réussite, Bélisaire épouse une de ses employées, Anne Antoinette Barbier qui le seconde dans le développement de son entreprise. Attachés au travail bien fait, ils s’attèlent ensemble à parfaire leur réputation auprès d’une clientèle privilégiée.
Le Bonbon Boule préféré de Victor Hugo

De l’imagination de l’ingénieux confiseur nait le désormais célèbre « bonbon boule » : ces jolies billes lisses gorgées de fruits font alors entrer Boissier dans notre patrimoine gourmand. Un classique qui résistera aux époques et aux différentes directions prises par la maison pour se renouveler.
En 1840, les pastilles sont très à la mode ; on les aime aromatisées à la menthe, à la rose ou encore au jasmin. Celles à l’ananas ont la faveur de la bourgeoisie et incarnent par excellence « Le bonbon des théâtres ». En effet, il est alors d’usage d’avoir des bonbons sur soi pour aller aux différentes distractions qu’offre la vie parisienne. Les banquiers du quartier de la bourse seront appelés « les éternels suceurs de pastilles ».
Parmi ces intellectuels, Victor Hugo fait figure de chef de file. Le romancier engagé se lie d’amitié avec Bélisaire et fait de la maison Boissier une de ses adresses préférées. C’est avec quelques vers inspirés qu’il immortalisera cette amitié gourmande : « Grâce à Boissier chères colombes, heureux à vos pieds, nous tombons. Car on prend les forts par les bombes, et les faibles par les bonbons. »
Luxe et volupté
C’est en 1857 que Bélisaire décide de transmettre sa maison à Cyrille Robineau, jeune visionnaire qui investit alors dans cette affaire qu’il sait florissante et déjà patrimoniale. Cet entrepreneur participe un peu plus encore à la prospérité de la maison Boissier en développant de nouveaux produits mais également en soignant les emballages et la décoration de ses boutiques. Il s’attache les services des plus grands artisans du luxe, telle que la Maison Songny pour proposer des boîtes et des sacs en peau et soie d’un grand raffinement. Ses héritiers feront appel aux meilleurs illustrateurs pour réaliser les dessins des affiches promotionnelles et des boîtes : ces dessins sont encore utilisés aujourd’hui, notamment sur des pochettes surprises dont ceux de Jacqueline Duché. Grand amoureux des livres qu’il collectionne, Cyrille Robineau comme son prédécesseur, entretient en cette fin de XIXème siècle des liens privilégiés avec leurs auteurs. On ne compte plus les citations des produits Boissier dans des oeuvres littéraires et autres créations artistiques : chez Alexandre Dumas, Emile Zola, les frères Goncourt ou encore le peintre Gustave Emile Couder. Le confiseur parisien incarne pour tous luxe et volupté. Un pouvoir évocateur que Cyrille Robineau encouragera toujours en baptisant régulièrement ses produits en l’honneur d’illustres parutions, théâtres et personnalités : les bonbons « Gil Blas », « le bonheur des Dames »...
L’excellence dans des écrins d’exception
S’il sait s’en assurer la promotion, Cyrille Robineau s’attache avant tout à conserver le degré d’excellence de la maison Boissier en s’appliquant dans le choix de ses ingrédients. On sollicite même le confiseur pour inventer des gourmandises à partir de fruits exotiques dont se délecteront les fins gourmets pendant plusieurs décennies.
Plusieurs décennies qui verront se succéder quatre générations, et ce malgré les trois guerres, à la direction d’une entreprise qui fait désormais figure d’institution. Dans les années 30 apparaitront les boîtes métalliques, de vraies petites oeuvres d’art : ces bonbonnières nickelées couvertes d’aluminium et ornées d’amusantes peintures sur verre ou sur glace font aujourd’hui le bonheur des collectionneurs.
En 1867, dans le Figaro : Boissier est le confiseur préféré de la haute bourgeoisie impériale « les douceurs de l’empire », les papillotes de la princesse Mathilde, les caramels du Petit Prince.
En 1879, Marie Duplessis, muse et compagne d’Alexandre Dumas (il s’est inspiré d’elle pour la dame aux Camélias), prend chez Boissier ses chocolats et ses bonbons pour le spectacle.
Le réveil de la belle endormie
L’histoire aurait pu s’arrêter pour cette maison mise en sommeil à la fin du XXème siècle, mais sa reprise commerciale par les fondateurs du Salon du Chocolat, Sylvie Douce et François Jeantet, ressuscite la belle endormie le 14 février 2000 : un beau cadeau de Saint-Valentin pour ces amoureux des produits d’exceptions qui ont alors à coeur de préserver un héritage gastronomique.
Depuis sa création, Boissier s’est ingéniée à conserver un savoir-faire artisanal unique en mêlant tradition et modernité. Ses confiseries haut-de-gamme naturelles préservent les saveurs authentiques de leurs ingrédients. Au fil du temps, les recettes ont été revisitées afin de diversifier la gamme et de proposer des recettes insolites et novatrices, adaptées aux inconditionnels et à une nouvelle clientèle. De même, les boîtes et le packaging ont été réédités depuis des archives Boissier redécouverte (collection d’environ 3000 objets collector de la marque).